Châteaurenard (13) – 31/08/13 – Discours de Bernard Bres, Université d’été 2013
Elle est partout, il suffit d’ouvrir les yeux et de regarder autour de soi : les mœurs, nos conduites, nos attitudes devant la vie et la mort. Celle-ci nous hante depuis 1914 qui a dévasté une génération et marque la fin du monde traditionnel (chute des monarchies : Romanov, Hohenzollern, Habsbourg). Joyce disait : « ce siècle est un cauchemar dont je tente de m’éveiller ». Le mot décadence, au sens de celle d’un État, d’une civilisation est apparu au milieu du XVIIIe en France et en Angleterre ; Rome étant pour nous la référence (1734 Montesquieu : « Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence » ainsi que Gibbon : « Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain ») même si le temps de l’histoire est né en Grèce. On pourrait aussi citer celle des Amérindiens au XVIe, de la Chine au XIXe ou de l’Empire ottoman au début du XXe sans parler des catastrophes comme la peste noire en 1348 qui tua un tiers des chrétiens. En fait, déjà les textes sumériens attestent de la conscience du déclin de leur empire, mais le mot décadence n’existe pas en latin (c’est le verbe degenerare qui est employé par Caton l’Ancien, Cicéron « O tempora, O mores » sous la République, Juvénal sous l’Empire. La décadence romaine est citée pour la première fois par les humanistes italiens au XVe au sens de ruine, chute, déclin, corruption. La décadence est un cadeau de la modernité (liée au mot progrès vers 1750). G.B. Shaw dira beaucoup plus tard : « la décadence ne peut trouver d’agents que lorsqu’elle porte le masque du progrès ».
Sont évoqués la subversion d’un état par des hommes plus forts, plus robustes, plus durs que ceux brisés par la mollesse, la corruption, la tyrannie ; la guerre (Carthage) ou un empire trop vaste devenu source de décadence (Alexandre, Rome, Charlemagne, Byzance, plus tard le Saint-Empire romain, Napoléon, les empires coloniaux) en poursuivant le rêve de l’unité perdue (qui est aussi celui de l’Eglise). La conscience de la décadence resurgit dans les années 1880–1910 avec par ex. Arthur de Gobineau qui distingue le monde aryen (l’Occident) qui représente l’intelligence, la civilisation, l’héritage antique et le monde sémite (musulmans, juifs) qui est celui de l’anarchie, de la barbarie du désert, de la violence et de l’intolérance religieuse puis, dans les années 1930 avec le célèbre ouvrage d’Oswald Spengler « Le déclin de l’Occident » et après la crise de1968. C’est la vieillesse de nos sociétés voire leur mort. En fait tout processus humain passe par les phases de la naissance, de l’apogée et de la chute, de l’ordre au désordre. Le temps ne cesse de nous détruire, c’est le mythe des dieux qui dévorent leurs enfants. Drieu disait : « la vie est une perpétuelle décadence ». Est-elle irréversible ? En 1939, les puissances coloniales européennes contrôlaient directement 50 millions de km2 (dont 82% par l’Angleterre et la France) et 1/3 de la population mondiale d’où une unification culturelle de la planète.
On perçoit rarement la décadence ; le processus est lent du moins au début ; arrivée à son terme, le corps social atteint est trop affaibli pour réagir. Les causes sont multiples, parmi celles-ci : le problème démographique. Le vieillissement de la population conjugué à l’immigration invasion après la parenthèse du baby-boom (1950–60) ont creusé l’écart entre la fécondité (1,7 enfant par femme française de souche / 2,1 avec celles d’origine étrangère) et la mortalité. L’Occident a connu sa révolution contraceptive, la banalisation de l’avortement et la promotion de l’homosexualité (voir le funeste et symbolique « mariage gay ») ce qui conduit à l’implosion de la société. Notons au passage que le Planning familial est d’inspiration américaine (Population Council et Birth Control 1951).
Sont donc liés la désagrégation de la famille, la féminisation des hommes, le relâchement des mœurs et les débordements sexuels presque constants dans les phases de décadence. Une trop grande liberté devient souvent la cause de celle-ci : « Recherchez la liberté et vous deviendrez esclave de vos désirs, recherchez la discipline et vous trouverez la liberté » Koan Zen.
S’y ajoutent la perte d’identité (une cité ne peut fonctionner que si un lien existe entre tous les citoyens, s’ils se reconnaissent un destin commun) l’oubli de l’Histoire (reniement de notre héritage) et de la mémoire. Or, la seule défaite irréparable c’est l’oubli. Le Maréchal Foch affirmait : « les peuples ne perdent la vie que lorsqu’ils perdent la mémoire ». Il est plus important de garder la mémoire que le feu sacré (vestales – vierges consacrées). Savons nous encore que nous sommes un peuple européen, de race blanche, de culture greco-latine et de religion chrétienne ! Il est vrai qu’autrefois c’était l’alliance du trône et de l’autel, du Roi et de l’Eglise et qu’aujourd’hui c’est celle du marché et du minaret ! Cette perte de notre système immunitaire est aggravée par l’immigration (conséquence de la décolonisation) et l’islamisation. Déjà Montesquieu remarquait « c’est un malheur pour la nature humaine lorsque la religion est donnée par un conquérant. La religion mahométane qui ne parle que de glaive agit encore sur les hommes avec cet esprit destructeur qui l’a fondée ». Quant à Bossuet : « L’Islam cette religion monstrueuse qui a pour toute raison son ignorance, pour toute persuasion sa violence et sa tyrannie, pour tout miracle, ses armes ». Mahomet était un homme de pillage et de sang qui prêchait sa doctrine à coups de cimeterre. Si bien que Charles de Foucault à la question : « les musulmans peuvent-ils devenir français ? », répondait : « non, car l’Islam est leur vraie patrie ». Face à la force, ils paraissent soumis en attendant… selon l’adage « baise la main que tu ne peux encore couper ». Les peuples non-musulmans sont destinés à être conquis. Certes le phénomène migratoire n’est pas nouveau. Dès le XIXe, nous avons eu des immigrés italiens, belges, puis polonais, espagnols, portugais (en 1876 : 800 000 – 1911 : 1,2 million – 1931 : 2,7 million /6,6% de la population ) mais après 1945 et surtout à partir de 1962, ce furent les maghrébins (plus de 2 millions entre 1962–74), armée de réserve du capital et prolétariat de substitution pour la gauche. Aujourd’hui c’est 350 000 nouveaux arrivants par an, la plupart extra-européens. Tous les ans, 150 000 immigrés deviennent français grâce à l’aberrant droit du sol (jus soli) : il faut revenir impérativement au droit du sang (jus sanguinis). Conséquence de cette invasion silencieuse : en 2050, 1/3 de la population sera issue de l’immigration. Selon les chiffres officiels, en 2008, il y avait 5 millions d’étrangers (6,5 avec les enfants) soit 11 % de la population sans compter les clandestins estimés à 350 000 dont le coût de la reconduite s’élève à 12 000 € par individu. Pour Gourevitch, en 2009, la population d’origine étrangère était de 7,7 millions (12,2 % de la population) dont 3,5 issus du Maghreb et 2,4 sub-sahariens. N’oublions pas la prédiction de Boumedienne « des millions d’hommes quitteront l’hémisphère sud pour aller dans l’hémisphère nord. Ils n’iront pas en tant qu’amis. Ils iront pour le conquérir et ils le feront en le peuplant avec leurs fils. C’est le ventre fécond de nos femmes qui nous donnera la victoire ».
Quant à Erdogan (premier ministre turc) « les mosquées sont nos casernes, les coupoles nos casques, les minarets nos baïonnettes et les croyants nos soldats ». Mais M. Valls continue à affirmer que l’immigration est une chance pour la France et naturalise à tour de bras alors que son coût global se monterait à 79,4 milliards dont les ¾ sont des coûts sociaux, les recettes n’étant que de 49 milliards donc un déficit de 30,5 milliards (d’autres avancent un chiffre de près de 40 milliards soit plus de 2 points de PIB). Depuis les années 70, les banlieues submergées par l’immigration sont des non-lieux. On y vit mais on n’y habite plus. C’est l’échec total de l’intégration, ces populations la refusant et la France ne proposant plus de modèle. C’est une société en voie de désintégration, en crise d’identité, une France qui ne s’aime plus. Dans ces zones de non-droit (« quartiers dits sensibles ») sévissent des « jeunes » qui font régner la terreur, déclenchent des émeutes, des incendies criminels, pratiquent toutes sortes de trafics dont la drogue, brûlent les véhicules, caillassent les forces de l’ordre et les pompiers, pratiquent le chômage professionnel et se prétendent victimes du racisme de la société. Ce sont des ghettos, une véritable contre société et une immigration de peuplement qui impose ses us et coutumes c’est-à-dire la barbarie. Leurs seules valeurs sont le clan, l’argent, le spectacle et le voile ! Et dire qu’Hollande voudrait délivrer le droit de vote aux immigrés non encore devenus des « français de papiers » !
Or la citoyenneté suppose une adhésion volontaire et un contrôle strict de la part de l’État. Pour sortir de la décadence, il faudra inverser à tout prix les flux migratoires qui menacent notre identité avec comme cheval de Troie, l’islam et son Coran, livre archaïque, sa charia barbare (affaires Rushdie, Van Gogh), ses foulards islamiques, ses excisions clitoridiennes, son djihadisme (affaire Merah), ses revendications ( les piscines, cantines scolaires, hôpitaux) son racisme anti-français et sa délinquance exponentielle (voir leur nombre considérable dans les prisons : plus de 80 % d’extra-européens pour la plupart musulmans).
Conséquence : 2/3 des Français ont une image négative de l’islam (deuxième religion en France) synonyme de soumission de la femme, fanatisme, retour en arrière et polygamie. Le multiculturalisme conduit à la guerre civile (Liban, Kosovo). Cette montée en puissance de l’islam a suivi la chute du communisme et l’accélération de la mondialisation. La ruine des idéologies et le réveil des identités nous menacent d’une dictature des minorités avec la lutte contre les discriminations, la police de la langue, des mœurs et de la pensée. C’est l’idéologie du cosmopolitisme : pas de frontières, libre échangisme, éloge de la diversité, du métissage des corps et des cultures (pourtant De Gaulle nous avait mis en garde : « Ceux qui prônent l’intégration des musulmans ont une cervelle de colibri »). C’est une sorte d’impératif moral. Or, diversité et métissage sont contradictoires. La gouvernance mondiale rêve de supprimer les racines, d’instaurer le nomadisme en tout genre et de niveler les cultures. Pour la France c’est la fin du « modèle républicain » d’assimilation qui fonctionna de 1860 à 1960 avec des immigrés européens catholiques.
Or, aujourd’hui la foi est devenue une affaire individuelle, réduite au statut d’opinion parmi d’autres. La religion n’organise plus la société. En France, elle a fait place à un laïcisme agressif contre l’identité (la prétendue neutralité face aux religions). Cette crise s’est aggravée depuis 1968 (crise des vocations, des convictions, perte de prestige, prêtres ouvriers …). Après Vatican II, l’Eglise s’engage sur la voie des réformes qui mettent à mal les rites et les dogmes. Aujourd’hui, 2 enfants sur 3 naissent hors mariage, bon nombre de chrétiens acceptent mal les prescriptions morales, la Tradition (sauvée et incarnée par Mgr Lefebvre et toujours vivace), la discipline, le renoncement. La mode est à l’œcuménisme (Assise 1986), aux relations avec les juifs (repentance lors du Jubilé de l’an 2000), les protestants et les hérétiques ; par contre elles ont échoué avec les orthodoxes. Durant des siècles, l’Église donna le ton pour les croyances, les valeurs, les comportements mais, de nos jours, elle n’est plus la clé de voûte ; elle est cantonnée à l’espace privé d’où une profonde déchristianisation, ce qui entraîne à l’école l’ignorance de nombreuses œuvres littéraires, philosophiques, picturales, musicales devenues hermétiques car elles ne peuvent se
comprendre que dans le contexte religieux.
L’école précisément est un autre symptôme de notre crise de société. L’Homme est un être inachevé, il doit apprendre des connaissances et des savoir-faire. Aujourd’hui, l’école va mal, le niveau s’écroule, les incivilités sont légion y compris la drogue et la violence. Le mammouth (1 million de fonctionnaires, 15 millions d’élèves et d’étudiants) est impuissant. Le pédagogisme à la sauce Meirieu, le collège unique (Haby 1975), le bac pour tous ont ruiné les cours magistraux et l’étude des textes classiques au profit de celle de la presse, des chansons et même du rap. L’école est le reflet de la société. Selon Condorcet, elle devait transformer l’Homme, régénérer l’humanité et pour Rousseau faire de l’individu un citoyen. Sa mission traditionnelle était d’apprendre et de transmettre. Or le monde actuel, ne fait que communiquer. L’idéal de la société, c’est l’utilitarisme ; elle a renoncé à éduquer et surtout à instruire. L’autorité des maîtres a été sapée par l’idéologie soixante huitarde (« il est interdit d’interdire »). Le laxisme a été instauré, on oublie le passé (histoire falsifiée, haine de son pays) et on désespère l’avenir (150 000 jeunes sortent du système tous les ans sans aucun diplôme). L’école devient un lieu de barbarie et de conformisme : selon le ministre Peillon « l’école doit arracher les élèves aux déterminismes (particulièrement familiaux). Ce qui manque au socialisme pour s’accomplir comme la pensée des temps nouveaux, c’est une religion nouvelle ». La langue est déstructurée. Depuis la fin des années 90 sont apparus des néologismes ridicules : auteure, professeure, écrivaine sous prétexte de féminiser les fonctions (la ministre), métiers, grades et titres. Ensuite ce fut l’attaque contre la syntaxe, l’accord du participe passé … il fallait éradiquer les règles de grammaire car le masculin l’emporte sur le féminin ! Du coup, il faut supprimer mademoiselle dans les correspondances et formulaires officiels (depuis février 2012). Bientôt avocate donnera maîtresse, on aura la cheftaine de l’État ou madame pour les jeunes filles. Négliger sa langue maternelle est un signe de décadence morale. Les réformes calamiteuses se sont succédé depuis 68. Elles visent toutes à l’égalité absolue, le refus de la sélection, elles privilégient le projet personnel de l’élève et obligent à investir toujours plus dans les ZEP et les « primo-arrivants ».
Résultat: 15 % des élèves entrent en 6e sans maîtriser la lecture, 20 % sont en difficultés et au niveau supérieur, la première grande école française est 65e dans le classement mondial.La discrimination positive est à l’ordre du jour (ex. Sciences Po. avec Richard Descoings – mort depuis dans des conditions suspectes…). Bref, on méprise le savoir sous prétexte d’égalitarisme forcené et on a l’illusion que l’outil informatique palliera l’absence de pensée critique. En fait, l’école doit relever les défis de la globalité, de la complexité, de l’expansion incontrôlée du savoir, sans parler de ceux culturels, sociologiques et civiques. L’école doit affronter l’incertitude. Heidegger disait « le corps enseignant doit se porter aux postes les plus avancés du danger que constitue l’incertitude permanente du monde ». Or, aujourd’hui, la seule réponse est quantitative : plus de crédits, plus de personnels. Il n’y a pas d’éducation sans valeurs. On a fait croire à des générations que la libre expression était la base de toute culture alors qu’elle ne peut être que son aboutissement le plus haut et le plus rare. Peguy s’interrogeait : « comment enseigner quand toute la société est pourrie de mensonges ». Quant à Montaigne, il pensait « qu’instruire, c’est allumer un feu ». Pour cela, il faudrait une révolution des mentalités et des comportements. – Ceci nous amène à la crise de la famille dynamitée par les réformes du divorce, du pacs, du mariage gay, de l’adoption sans oublier la révolution de la contraception, le travail des femmes, la libération sexuelle, l’avortement, la reproduction artificielle (fécondation in-vitro, insémination par donneur, dons d’ovules, implantation d’embryon) et bientôt la GPA (gestation pour autrui), la PMA (procréation médicalement assistée), la polygamie, la théorie du genre et la féminisation de la société. Pourtant pour 88 % des Français, la famille est la chose la plus importante de l’existence alors qu’on constate une chute des mariages, une hausse des divorces (1/3), une baisse de la natalité, de plus en plus de foyers avec un parent unique, des mères sans mari, des célibataires avec enfants, des couples à durée de vie limitée, des familles recomposées et maintenant des couples et mariages gays…
La famille était depuis le XVIIIe siècle l’idéal bourgeois, puis populaire. Aujourd’hui, on ne nait plus en famille et on n’y meurt plus. La famille est un refuge, c’est le « cocooning », un pont entre l’individu et le social, un réseau de solidarité, elle panse les plaies infligées par la société ; sa fonction n’est plus d’assurer une lignée ou de transmettre un patrimoine. De nos jours, le père a perdu ses prérogatives (réformes marquant la fin de l’incapacité de la femme mariée en 1965, l’autorité du chef de famille en 70, l’égalité entre époux dans les régimes matrimoniaux et la gestion des biens en 85, l’autorité parentale partagée en cas de divorce en 93). La société a adopté des valeurs féminines selon A. de Benoist : primat de l’économie sur la politique, de la consommation sur la production, de la description sur la décision, déclin de l’autorité au profit du dialogue, obsession de la protection de l’enfant et survalorisation de sa parole (ex. affaire d’Outreau), mise sur la place publique de la vie privée, confessions intimes de la télé-réalité, vogue de l’humanitaire et de la charité médiatique, problèmes de sexualité, de procréation et de santé au premier plan, obsession du paraître, du vouloir plaire et du soin de soi mais pour l’homme la séduction est souvent assimilée à la manipulation voire au harcèlement, féminisation de certaines professions (école, magistrature, psychologues, travailleurs sociaux, métiers de la communication et des services), sacralisation du mariage d’amour, idéologie victimaire, multiplication des cellules psychologiques, développement des marchés de l’émotionnel et de l’apitoiement, dévoiement de la justice qui doit faire droit à la douleur des victimes (« faire son deuil »), déification du couple et de ses problèmes, goût de la transparence et de la mixité, fin du mode impératif dans le langage courant : cette globalisation instaure un monde sans frontières ni repères, ce qu’il appelle un monde « liquide ». Cette féminisation est un symptôme de perte de virilité, d’effacement du père et une confusion des rôles masculin-féminin. Le père est réduit à une fonction économique et administrative, à un soutien affectif et sentimental, il exécute les volontés maternelles, il devient une sorte d’assistance sociale et ménagère, un changeur de couches et un pousseur de caddies.
Or, le Père symbolise la Loi au-dessus du subjectif familial ; c’est celui qui coupe le lien fusionnel enfant-mère (il met fin au complexe d’Œdipe), il aide l’enfant à sortir du narcissisme et à entrer dans le monde sinon la société fabrique des immatures.L’homme devient un enfant à materner et la société un gigantesque jardin d’enfants. Il assure la transmission du nom (mais remise en cause par la réforme de 2005), l’identité, l’héritage culturel et la tâche à poursuivre. L’enfant sans père a du mal à accéder au « non » symbolique. La confusion homme/femme, celle des repères et des rôles (85% des familles divorcées ou séparées ont une mère seule), l’homoparentalité (2 millions de personnes) nient l’importance de la filiation, déresponsabilisent les parents et renforcent la surveillance et le contrôle accru de l’État-Providence qui se transforme en une Big-Mother : c’est une société sans père et sans repères, Narcisse roi. La féminisation de la société et la promotion de l’enfant-roi provoquent le « jeunisme » qui s’impose aux parents. Le désir prime, on refuse l’effort, le langage enfantin s’instaure, le tutoiement systématique, l’usage du prénom au lieu du nom de famille d’où des adultes infantiles et des petites filles nymphettes (miss beauté) avec l’aval des parents. L’homme est assimilé à la virilité, à la brutalité, l’héroïsme, ce qui est mal vu. Avant au sacrifice féminin lors de la naissance correspondait le sacrifice lié à la guerre. L’homme a perdu sa fonction de protéger, de défendre, d’attaquer, donc de tuer. Désormais, il doit développer des qualités féminines : soigner son apparence, être sensuel mais pas obsédé, amoureux mais tolérant, savoir tout faire à la maison, s’occuper des enfants, laisser du temps libre à sa femme, gagner beaucoup d’argent, être énergique mais pas « macho », gentil mais pas dominateur, parfois efféminé, culpabilisé … bref, il doit se soumettre ou renoncer ! L’homme a l’angoisse et la peur d’être débordé (syndrome de la mante religieuse). Face à la femme, il se voit impuissant et coupable. On attend trop de lui et quoi ? Les femmes continuent de rechercher « le vrai homme » et en même temps tout les pousse à le rejeter d’où l’échec des relations homme-femme et le malaise de l’homme face à la puissance de la figure maternelle.
Le dernier avatar en date, c’est la théorie du genre. L’ultime déconstruction c’est celle du sexe : le régime de l’informe. On distinguait jadis la cité de Dieu et celle des hommes. L’individu était secondaire alors qu’il est souverain aujourd’hui et que selon certains Dieu n’existe plus… Nous sommes homme dans la mesure où nous appartenons à un peuple, une culture, une tradition. Or, selon un livre de Judith Butter, philosophe américaine, paru en 1990, l’identité sexuelle serait le résultat d’une construction sociale : c’est le fameux « gender » ou théorie du genre qui est un refus foncier de la Nature et du corps sexué. En 2012, lors de son congrès, le PS a proposé que « la déconstruction des représentations sexuées soit enseignée par l’école de la république dès le plus jeune âge ». Depuis 2011, les manuels s’y réfèrent : pour Hachette l’identité sexuelle est la perception sexuelle que l’on a de son propre sexe et de son orientation sexuelle. Le sexe biologique ne nous permet pas de nous qualifier homme ou femme ! Nathan lui aussi dénonce des stéréotypes. Cette théorie née dans les années 50–60 dans le cadre d’études cliniques sur l’hermaphrodisme et la transsexualité fut reprise par le mouvement féministe et en France par des penseurs radicaux comme Foucault, Derrida, Hélène Cixous. En 1995, le mot gender apparaît à l’ONU et en 2011 au Conseil de l’Europe (il rappelle le mot célèbre de Simone de Beauvoir « on ne nait pas femme, on le devient » et les fantasmes d’Élisabeth Badinter « le monde androgyne est l’avenir »). Donc, l’identité sexuelle serait la production de l’éducation, d’une construction sociale, de préjugés, de stéréotypes inculqués dès l’enfance. Le sexe biologique n’a plus d’importance, il n’y a plus de normes. La psyché préexiste au corps. Donc il faut détruire l’hétérosexualité produit d’un déterminisme culturel, de règles oppressives et hiérarchisées. Par conséquent, on nie toute identité fondée sur le sexe. Chacun peut instaurer sa norme et revendiquer : c’est le triomphe de la subjectivité (en effet, la différenciation aurait servi à opprimer les femmes). Les différences existent peut être, mais ignorons-les ! Or, on ne choisit pas son sexe, cette différence est la plus immédiate, la plus fondamentale au sein de l’espèce humaine, elle s’impose à tous. Rien n’effacera le sexe (un être est XX ou XY) : l’orientation sexuelle ne remet pas en cause le corps sexué (c’est une pulsion). Les rôles sociaux varient d’une culture à l’autre mais jamais dans le passé, dans aucune société ou culture, il n’y a eu absence d’une telle répartition, aucune n’a assigné aux hommes ou aux femmes les mêmes fonctions ou rôles sociaux. Dans toutes les cultures du monde, les filles préfèrent les poupées, les garçons les voitures (ainsi un bébé fille répond aux pleurs d’un autre bébé, un garçon non). Les expériences consistant à élever un garçon comme une fille ou l’inverse ont échoué car le cerveau est sexué. S’attaquer à la distinction des sexes, c’est nier la différence fondatrice de l’humanité.
Pourtant alors que beaucoup de contemporains sont affranchis de toute règle, règne l’ordre moral appelé éthique (pour une société laïque, c’est mieux). La nouvelle morale définit ce que la société doit devenir : elle doit être « juste ». C’est une société ultra-permissive et hyper-morale. Il faut transformer le monde pour le rendre plus égalitaire. C’est le refus du monde tel qu’il est. Le salut chrétien est remplacé par la foi en le progrès : à la fin la société sera parfaite ! Cette idéologie du progrès affirme que les peuples parviendront au même type de société. Les Lumières déjà au XVIIIe rejetaient tout héritage : la liberté c’est s’émanciper du passé (mais Fustel de Coulanges affirmait : « le passé ne meurt jamais en l’Homme, il peut bien l’oublier mais il le garde toujours en lui »). L’Homme ainsi se créerait lui-même à partir de rien, ce qui serait surréaliste ! On considère à présent que les différences sont sources d’inégalité et d’oppression. L’Homme est sensé être le même partout, ce qui est absurde. L’idéologie des Droits de l’Homme est devenue la religion de notre temps. C’est une dictature morale qui s’appuie sur l’affectivité ; le mal absolu c’est la négation de celle-ci. La nouvelle inquisition dispose d’un arsenal juridique (lois Gayssot, Perben, Lellouche, Taubira …), ses dévots, ses missionnaires et ses ligues de vertu (Licra, Mrap, Ligue des Droits de l’Homme, SOS Racisme, Crif …). Toute singularité ou identité est assimilée à du fanatisme, de la xénophobie, de la discrimination, du racisme, du fascisme et poursuivie. « L’Empire du Bien » investit tout même le plus intime de la vie privée. De ce fait, les individus « libérés » des règles de comportement traditionnel n’ont jamais été aussi uniformisés. Le communisme totalitaire l’avait rêvé, le libéralisme occidental l’a réalisé : le flicage devient généralisé et sophistiqué. C’est la fin des valeurs aristocratiques et populaires, le triomphe des valeurs bourgeoises. C’est la dictature des « bons sentiments » qui telle l’eau tiède se déverse sur les masses et les individus. C’est la mort de l’esprit (De Gaulle utilisait 4 000 mots, Sarkozy 400 et Hollande anone). Les journalistes et les média font la loi, c’est le discours permanent des nouveaux bulletins paroissiaux. Nous vivons dans le présent perpétuel, l’instant (plus de passé ni de futur), le cœur s’exhibe, les politiques expriment « leur émotion », leur solidarité, les faits de société et le compassionnel règnent (ex : Lady Di). Partout les politiques entonnent la ritournelle des « valeurs » (dialogue, tolérance, humanisme).
Beaucoup de films et de feuilletons TV sont des romans à l’eau de rose (femmes battues, peines de cœur, viols pour mettre du piment …) avec tous les poncifs du jour, le Téléthon quête son obole, on se goinfre dans une « teuf » pour lutter contre la faim dans le monde, l’hystérie footballistique déclenche un pseudo délire patriotique ; on attaque toujours les tabous d’hier, les traditions mais on ne dénonce jamais ceux d’aujourd’hui. Les contestataires de mai 68 voulaient jouir sans entraves, la société de consommation les a comblés ; ainsi l’avant-garde est devenue un nouvel académisme : la contre culture du « bobo ». Par ailleurs, l’état hygiéniste promet d’éliminer l’aléa, le risque, le conflit mais un proverbe indien dit : « il n’y a pas de bouclier contre le destin ». C’est la sécurisation à outrance. Le contrôle social s’étend pour tout uniformiser (voir la platitude des discours politiques), c’est l’aliénation, l’asservissement et l’autocensure (même dans les cercles privés, les gens hésitent à parler). Le peuple doit avoir peur de déroger aux normes. L’homme de l’empire du bien est un zombie, replié sur lui-même dans l’anonymat de masse (selon Philippe Murray nous sommes passés de l’homo sapiens à l’homo festivus). Ainsi cette société sans repère devient chaotique, le conformisme s’étend avec des esclaves sans maître, déracinés, sans culture, interchangeables, vulnérables sous l’emprise du marché et de l’État. Le peuple est devenu victime et timoré sous l’empire du bien où la compassion et la pitié sont à l’opposé de toute justice sociale (les dames patronnesses du XIXe ont été remplacées par « les restos du cœur ». On parle de fracture sociale, de déshérités, d’exclus, de défavorisés, de handicaps… L’État devient le thérapeute. Or, discriminer c’est distinguer, discerner : tout ceci est considéré comme injuste, arbitraire voire comme une incitation à la haine.
La Justice est désormais chargée de faire régner ce nouvel ordre moral avec la loi instaurant la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) et toutes les lois dites antiracistes déjà citées. La moindre sélection, préférence, hiérarchie devient intolérable : c’est l’art. 225–1 Code Pénal « toute distinction entre les personnes à raison de leur origine, sexe, situation familiale, apparence physique, de leur patronyme, état de santé, handicap, de leurs caractéristiques génétiques, mœurs, orientation sexuelle, de l’âge, opinion politique, activité syndicale, appartenance vraie ou supposée à une ethnie, nation, race ou religion déterminée constitue une discrimination ». Mais les mêmes font l’éloge de la discrimination positive c’est-à-dire de passe-droits et privilèges pour les prétendus défavorisés. Or, tout ordre social se caractérise par des exclusions et des discriminations. Etre victime de nos jours est rentable (voir le fameux « devoir de mémoire » qui contredit souvent l’Histoire car il est subjectif). Quant à l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité, elle est contraire à la tradition européenne (celle de l’amnistie et du devoir d’oubli). L’Histoire est muselée (par ex. la loi Gayssot interdit de contester le jugement de Nuremberg qui pourtant attribue faussement le crime de Katyn commis par les soviétiques aux allemands). De même, la loi Taubira sur l’esclavage colonial qui ne dit mot de la traite négrière ou musulmane qui firent pourtant plus de victimes et durèrent bien au-delà ! La loi doit-elle décider de la vérité historique ? Non, car elle conduit à l’aberrante litanie des repentances (colonisation, Vichy, Algérie etc…). Le droit devient une morale de substitution. Les juges exercent une autorité au-dessus de la politique (mais voir le « mur des cons » et le Syndicat de la magistrature qui ne respecte aucune déontologie). Or, tenter de moraliser le Politique, c’est l’anéantir selon Julien Freund. C’est une source de despotisme et de dictature (ex.voir Machiavel et sa critique de Savonarole).
Mais aujourd’hui, le Politique qui doit organiser les pouvoirs, designer l’ennemi et exercer le commandement, ne gouverne plus rien. La démocratie est par essence participative et non représentative : c’est le modèle grec. Notre système est épuisé car notre démocratie en faillite ne représente plus rien avec ses élites autoproclamées. Valéry disait : « la politique c’est l’art d’empêcher les gens de prendre part aux affaires les concernant ». Il faut rétablir le référendum et la proportionnelle. Or, le droit, l’économie, la morale sont au-dessus du politique sans oublier la perte de notre souveraineté et le mondialisme annoncés lors de déclarations célèbres : « La souveraineté supranationale d’une élite intellectuelle et de banquiers mondiaux est certainement préférable aux décisions nationales qui se prennent depuis des siècles » (D. Rockefeller 1991) et « nous aurons un jour un gouvernement mondial que cela plaise ou non, la seule question est de savoir s’il sera créé par la conquête ou par le consentement » (Rockefeller, Rothschild et Warburg 1950).
Pour revenir à la justice, rappelons que celle-ci s’est construite sur l’idée de l’élimination de la vengeance privée. Seule l’institution judiciaire est investie du droit de punir au nom de la société. Mais depuis trente ans, la justice devient réparatrice ; elle se concentre sur le préjudice occasionné d’où l’importance donnée aux parties civiles et les droits exorbitants reconnus à certaines associations anti-racistes d’ester en justice et de percevoir des sommes ruineuses pour les condamnés. C’est une régression, le retour à la loi du talion, les principes sont violés (lois rétroactives après 1945) ; or le mépris des lois, c’est le commencement de la décadence. Selon l’adage romain « ubi societas, ibi jus », il n’y a de société que là où il y a du droit. En Europe, la justice repose sur la notion d’équité, l’ordre naturel dans l’Antiquité. Platon la présente comme « la médecine de la méchanceté », Rome l’assimile à la vertu, pour Aristote le juge est un magistrat institué par la communauté pour dire le droit, pour Hobbes, il doit se borner à être l’organe souverain et pour Kant c’est celui qui interprète la loi, parachève l’œuvre législative ou constitutionnelle.
Présentement, la justice se réfère aux droits de l’homme et à l’État de droit. Celui-ci cherche à subordonner le politique au droit tandis que le juge est amené lui-même à jouer de plus en plus un rôle politique. Pendant ce temps, nous avons 63 000 détenus pour 51 000 places, 20% des peines de prison ferme ne sont pas exécutées et 1/3 des détenus relèvent, paraît-il, de la psychiatrie. Parallèlement en 2009, 1 million de gardes à vue ont été prononcées parfois pour n’importe quelle raison (voir en 2013 la répression féroce suite aux manifestations contre le mariage gay). L’institution judiciaire se montre laxiste pour des délits graves, mais est inflexible en cas de racisme supposé ou d’homophobie : les mal pensants subissent ses foudres (par ex. les dissolutions récentes de mouvements nationalistes). Aujourd’hui le délinquant est perçu comme une victime surtout s’il est immigré, il faut le réinsérer, la répression est source d’exclusion, payer sa dette, châtier serait trop traumatisant… On se focalise sur le milieu (pauvreté, chômage, inégalités, famille, éducation, environnement social) mais jamais sur la nature du délinquant. Les lois s’empilent, les réformes aussi, les prisons sont considérées comme des écoles du crime, les Français se sentent abandonnés par l’État, livrés aux voyous souvent d’outre-Méditerranée et sont tentés par l’autodéfense vivement réprimée par la justice. On veut sanctionner toujours plus et en même temps tout est fait pour ne pas incarcérer (toute personne condamnée à une peine de 2 ans ou moins ne l’est pas) : 80 000 peines ne seraient jamais exécutées et Taubira veut même remplacer la prison par la probation jusqu’à 5 années prononcées ! Les politiques se contentent de voter des lois de circonstances qui deviennent incompréhensibles pour le citoyen de base confronté à la triste réalité de la délinquance, sans parler de l’influence néfaste de la Cour de Justice européenne et de la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Le MNR soumettra à référendum le rétablissement de la peine de mort pour les crimes les plus graves et des peines fermes seront exécutées sans faiblesse y compris pour les mineurs.
Au-delà de la Justice, pour surveiller la société, on dispose maintenant de moyens que les régimes totalitaires ne possédaient pas. Le politiquement correct impose des mots à tous : c’est la pensée unique. Le débat est remplacé par le sermon, la propagande, l’état réglemente tout. Ainsi, même la lutte contre le terrorisme permet de supprimer des libertés. La société devient un panoptique plus redoutable que celui de Bentham. Elle devient « un troupeau d’animaux ternes et industrieux » selon le jugement de Tocqueville. Avant on parlait de « classes dangereuses », à présent, c’est le peuple lui-même qu’il faut domestiquer. Péguy constatait : « quand ce n’est pas le martyre physique, ce sont les êtres qui n’arrivent plus à respirer ». Le Prince moderne veut tout voir, tout écouter comme le tyran Hiéron à Syracuse dans l’Antiquité. Aujourd’hui, le réseau d’écoute planétaire « Echelon » intercepte 80% des communications à travers le monde (voir affaire Snowden ) : l’informatique, internet, les satellites sont les instruments de la société de surveillance. Le citoyen est désarmé : à quand les puces électroniques pour contrôler les individus ?
Cette société dépressive ou chacun est censé être son propre souverain a de plus en plus d’interdits et de tabous alors que les repères ont été abolis. C’est le règne de l’illimité : le virtuel domine le réel. C’est une société de plaisirs, de libertés mais aussi de conformisme, de surveillance et de la performance. L’homme se sent dépassé, vulnérable et fragile : l’espérance s’évanouit, la fatalité l’emporte avec l’ennui et la mélancolie. On survit mais on ne « vit » pas (obsession de la sécurité, peur de la mort). Rien n’a plus de sens : les sociétés les plus riches sont les plus pauvres spirituellement. Toutes ces causes provoquent le grand malaise actuel avec l’effacement des différences. Il y a pluralités d’identités revendiquées de toutes parts : linguistiques, ethnoculturelles, religieuses, sexuelles d’où des conflits portant sur les valeurs. Qui suis-je ? Qui sommes-nous ? La question ne se pose pas dans la société traditionnelle. Denis de Rougemont disait : « la décadence d’une société commence quand l’homme se demande : que va-t-il arriver au lieu de que faire ? ». Elle se pose en cas de dissolution des liens sociaux et de destruction des repères. L’idéal n’est plus, comme dans la pensée classique, de se conformer à l’ordre naturel mais de s’en affranchir. La modernité s’attaque aux traditions, aux croyances afin d’instaurer un monde uniforme ; seules les inégalités quantitatives demeurent. Or, chaque peuple s’identifie dans l’histoire, des valeurs ou des modèles. C’est le savoir commun (héros, âge d’or…), c’est l’imaginaire (mythes grecs, cycle du Graal…), c’est l’identité reconnue.
Selon René Char : « notre héritage n’est précédé d’aucun testament » (c’est-à-dire sans répartition). La conscience identitaire, c’est la préférence naturelle pour ceux qui partagent la même appartenance que nous (ex. breton, français, européen, chrétien). Il y a celle de proximité (famille, peuple, ethnie, nation), celle de la mémoire (histoire, traditions), celle biologique (devenue suspecte car les races n’existent plus,parait-il !) et enfin culturelle (façon de vivre, de penser, de croire). Or la société marchande exige l’abandon des identités et le Système tient les média, réduit les détracteurs au silence, fait régner partout fatalisme et soumission ; il distribue les rôles : pouvoir légal, opposition tolérée et supprime les contre pouvoirs (extrême-droite par ex). Tel un Jupiter moderne, il rend fou ceux qu’il veut défendre : il suscite de faux rebelles à profusion (voir le show-biz) et répand la confusion idéologique. C’est la fin des illusions lyriques et des utopies « style mai 68 ». Un vrai rebelle, c’est un Soljenitsyne et non un pseudo philosophe tel BHL passé du maoïsme au gauchisme mondain et au sionisme ou le milliardaire gay Bergé : avec ces gens-là on pourrait reprendre la phrase de Cioran : « l’Occident est une pourriture qui sent bon ». Le pouvoir d’antan est un astre mort. Aucune révolution ne peut renverser le système selon les anciennes méthodes. Il n’y a plus de Palais d’Hiver à occuper manu militari : ce sont les réseaux qui importent d’où le désarroi. L’Empire n’a pas de centre ni de frontières ou barrières. C’est un appareil décentralisé avec des frontières mouvantes en constante expansion, des identités hybrides, des hiérarchies flexibles, des échanges pluriels et des réseaux de commandement.
Alors vivons-nous vraiment la fin d’un monde ? En réalité la fin de notre monde à déjà eu lieu. A disparu le monde où les enfants savaient lire et écouter, admirer les héros et non les voyous ou les victimes, où l’idéologie ne broyait pas les âmes, où il y avait plus de devoirs que de droits, où l’honneur (« la poésie du devoir » selon A. de Vigny) était sacré, où il y avait des frontières, des traditions, des identités charnelles, des repères, où la vie quotidienne était réglée, où on croyait en Dieu et où la famille était respectée. Aujourd’hui, espace et temps sont abolis, la société éclatée, livrée aux marchands, c’est la religion du moi narcissique, la liberté absolue, la politique de la table rase, l’individu devient précaire et nomade. Depuis 68, la modernisation émancipatrice (libéralisme, multiculturalisme) a bouleversé l’économie et la société avec pour objectif d’éliminer les communautés identitaires : le profit domine tout. Il faut rendre impossible le retour à la tradition. Quant à l’État, il pratique la « gouvernance » (en fait ce sont les financiers qui dirigent). L’économie est entrée en austérité et en dépression (¼ de la population européenne est menacée de pauvreté). Les peuples paraissent épuisés, sidérés, abêtis, fatalistes. Faut-il s’enfoncer dans le chaos et la nuit, attendre et subir en déplorant le passé ou poser les jalons d’une renaissance ? Faisons nôtre le conseil de George Orwell : « dans une époque de malhonnêteté universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire ».
Nos amis de Polémia par la plume d’Yvan Blot font une analyse intéressante. Pour eux, la décadence de l’Occident (la terre du couchant ) américanisé a été mis en exergue par Heidegger dans son analyse du système (le Gestell). La société aurait 4 idoles majeures : la technique, l’argent, la masse et l’égo ce qui résume bien notre analyse. Ces idoles provoquent l’asservissement de l’homme par le Gestell comme nous l’avons démontré par ailleurs. Pour en sortir, il propose des voies philosophiques dont les valeurs s’opposeront à la décadence de notre monde européen en voie de disparition. Il faut retourner à l’être de notre humanité, c’est un préalable absolu car la politique seule ne peut guérir cette maladie dont elle ignore l’essence. Yvan Blot préconise face à la technique le recours à la beauté. Selon lui, la religion la plus consciente serait l’orthodoxie avec l’amour de la beauté de la Création tel que le prône Dostoïevski. En effet, l’utilitarisme, c’est la primauté à la laideur, il détruit la terre, l’idéal, rend l’homme médiocre, efface le sacré et le divin. L’homme devient un animal. Il faut rechercher la beauté et retrouver la méditation. Face à l’argent, opérer un retour aux valeurs de la démocratie directe et de la liberté enracinées dans un cadre national. Aujourd’hui, l’État obèse et impuissant affaiblit la démocratie confisquée par les oligarchies, les institutions internationales dominent avec les puissances d’argent irresponsables dont les gestionnaires apatrides s’apparentent à des délinquants (voir scandales financiers). Face à la masse, nous devons recourir à une éducation humaniste. Il faut une culture non seulement technique mais aussi éthique, militaire, patriotique comme par ex. en Russie. Revenons au modèle gréco-latin : un citoyen bien dans son âme et son corps visant à se dépasser soi-même vers la perfection. Face à l’égo, un retour à une dimension religieuse. Le christianisme a forgé la France et il est au-dessus des autres religions. L’homme est appelé à imiter le divin (Dieu s’est fait homme), il ne faut pas couper le chaînon entre la philosophie d’Aristote et le christianisme. Donc, l’Homme pourrait retrouver sa liberté authentique et se libérer de l’utilitarisme technique, de la cupidité et du conformisme de la masse décervelée et de son égo (retrouver l’héroïsme symbolisé par St-Georges combattant le dragon). Le pouvoir doit revenir au peuple servi par une aristocratie du courage et de l’esprit, position voisine de celle de D. Venner.
Pour notre part et pour conclure, nous avons vu que la nouvelle Guerre de Trente Ans (1914–45) fut aussi funeste que la guerre du Péloponnèse pour les cités grecques. Après 45, nous entrons en
dormition suite à ce quasi-suicide et sa folle dépense d’énergie et de sang. L’Europe amputée à Yalta a les USA et l’URSS comme suzerains ; de plus, elle est écrasée sous le poids de sa prétendue
responsabilité quant à la Shoah, plongée dans les délices de la consommation de masse, de la pornographie et des idéologies mortifères, rongée par une crise identitaire morale et financière. Elle a perdu sa part prométhéenne ou faustienne (modernité, science, technique, commerce), reste sa part apollinienne selon Venner. Elle ploie sous le fardeau (poids du passé) minée par le relativisme et le communautarisme, elle confond la morale et les droits de l’homme. L’Europe tient son identité d’un regard platonicien sur le monde, la Cité et l’Homme, une conception idéaliste de la science, de la politique et de la morale ; visions régies par l’idéal de vérité, de justice et de l’idée du Bien. L’Occident a appris à tous comment accéder à l’universel en inventant l’institution de l’école et de l’université (la mondialisation est aussi issue de l’Europe). L’Europe fut la matrice de l’humanité, elle doit assumer sa propre culture, son héritage, revenir aux principes qui ont été les siens. L’imprévu est roi, l’avenir imprévisible, il n’y a pas de fatalité historique. Nous devons affronter d’immenses défis et des catastrophes redoutables. Il faut retrouver notre individualité agissante, notre inventivité et notre énergie. L’humanité est diverse, faite de discriminations vitales, de séparations fécondes ; la mondialisation provoquera des explosions et la recherche de l’identité pour chaque société. Certes, l’Occident était blanc et chrétien, il l’est de moins en moins, colonisé par ses anciennes possessions mais contrairement aux USA (génocide indien), les européens sont des indigènes. Aujourd’hui nous avons peur de l’Islam, c’est le choc des civilisations, nous avons la nostalgie de l’Empire et de sa suprématie ; un basculement s’est produit avec l’oubli de nos racines gréco-latines pour celles judéo-chrétiennes et la fascination pour la culture des USA dont Oscar Wilde disait « qu’ils formaient un pays qui est passé directement de la barbarie à la décadence sans avoir jamais connu la civilisation ».
L’Europe sort de l’Histoire, elle renie son passé et a peur de l’avenir, elle a adopté une morale abstraite (droits de l’homme), a renoncé à la puissance, elle veut le consensus, elle est en état d’apesanteur et de léthargie. Elle a oublié que l’histoire est tragique et consent à sa propre disparition en sombrant dans un nihilisme généralisé. Peut-elle renaître et incarner le foyer d’une nouvelle culture ? La politique doit reprendre ses droits : capacité d’une société à se délimiter, à s’identifier, à choisir à l’extérieur ce qui la nourrit, la renforce et à rejeter ce qui menace son unité interne, capacité de se connaître, de se choisir, de se préférer face à l’empire américain sioniste et à l’Islam. Là est la voie de la renaissance à laquelle le MNR est prêt à apporter sa contribution.
Bernard Bres
Membre du Bureau national